Maintenance et coût global

La démarche du coût global, bien que connue depuis les années 1980, connaît un très fort développement dans le contexte d’exigences environnementales et économiques actuelles. Le coût global consiste à intégrer l’ensemble des coûts d’un projet de construction ou de rénovation sur la durée du cycle de vie complet d’un bâtiment.

C’est un outil d’aide à la décision technico-économique qui répond à deux axes d’analyse :

  • Il va orienter les choix de construction ou de rénovation
  • Il va permettre d’optimiser la gestion patrimoniale

Pour qu’il soit pertinent, il doit être mis en œuvre le plus tôt possible au démarrage d’une opération et il doit être réactualisé tout au long de la vie du projet ou de la gestion du patrimoine.

Son intérêt est tel qu’il est désormais plébiscité et pris en compte notamment dans le code des marchés publics depuis 2016, dans l’évaluation de la soutenabilité des travaux de rénovations embarqués, dans l’application de la loi de transition énergétique pour la croissance verte et évoqué au niveau européen dans l’évaluation des politiques publiques en matière de construction.

Enfin, l’évaluation technico-économique en coût global fait partie intégrante de la RE 2020 qui instaure le principe du cycle de vie des bâtiments.

Dans cette démarche, l’entretien et la maintenance, en fonction des définitions, s’avèrent essentiels puisqu’ils se manifestent dès la livraison ou l’acquisition et conditionnent une grande partie du résultat du coût global.

La maintenance préventive toujours pertinente ?

Il est de règle de mettre en place, sur la base d’expertises métier, des calendriers d’intervention destinés à pratiquer régulièrement des actions techniques afin d’éviter l’incident, la panne ou la dégradation responsable de préjudices d’usage ou financiers.

Toutefois, l’action de maintenance préventive n’est pas toujours précédée d’un contrôle qui justifie l’intervention dont l’efficacité est amoindrie. A contrario, déclenchée trop tardivement, l’action préventive se transforme rapidement en maintenance curative, entraînant un dépassement budgétaire.

Par ailleurs, certains usages spécifiques ou contextes particuliers de l’exploitation d’un bien modifient le modèle de vieillissement des installations ou matériaux et la nature des contrats engagés ne facilite pas l’adaptation rapide aux circonstances. De fait, la maintenance curative vient compléter les opérations programmées.

Enfin, l’environnement et les phénomènes naturels qui étaient considérés comme identifiés et stables sur un territoire, sont désormais beaucoup plus aléatoires et participent à créer des événements inattendus et perturbateurs du rythme des interventions. Un été plus chaud, une pluviométrie anormale, des changements climatiques brutaux et répétés entraînent des changements d’usage et peuvent accélérer certaines dégradations sans que la périodicité de la maintenance préventive soit remise en cause.

Si la maintenance préventive reste nécessaire, elle doit pouvoir s’adapter davantage à une plus grande diversité de bâtiments de tous âges, à des matériaux innovants, à des exigences environnementales de plus en plus restrictives et à des attentes des résidents et utilisateurs de plus en plus attentifs à leur santé et conditions de vie.

La maintenance prédictive, une nouvelle approche évolutive

En parallèle de la généralisation de la démarche du coût global, il y a les avancées du numérique dans le secteur de la construction qui permettent désormais de rassembler toutes les informations essentielles à la description d’un projet notamment via le BIM. Grâce à la représentation 3D du bâti qui favorise un travail collaboratif de tous les corps de métier, il est possible de constituer une base des spécificités des matériaux, des structures, des techniques susceptibles d’impacter la
programmation des maintenances associées.

Si l’on rapproche l’ensemble des données numériques d’un projet de bases de données sur les modèles de vieillissement des matériaux, sur les modèles de fatigue des métaux ou de structure, voire sur des modèles d’érosion et de décomposition des revêtements extérieurs, il devient possible de simuler plusieurs hypothèses d’altération de la construction neuve ou ancienne.
On peut donc superposer un schéma de maintenance préventive à une ou plusieurs simulations et s’apercevoir que certaines opérations sont anticipées ou au contraire trop tardives par rapport à ce qui est prévisible.

En parfaite concordance avec la démarche de coût global, la maintenance prédictive permet dès les premières hypothèses de travail de prendre en compte les matériaux, les contraintes, les usages, voire des paramètres environnementaux pour contribuer à définir une enveloppe budgétaire réaliste mais surtout réajustable à tout moment. En fonction des événements, le gestionnaire peut générer de nouvelles simulations qui impacteront plus ou moins le coût global et contribueront à des prises de décision argumentées. La maintenance prédictive est un atout tant pour le gestionnaire que pour les autres parties prenantes qui peuvent ainsi accéder à une anticipation de leur activité et adapter leur offre de services.

Dans un contexte immobilier où la démolition n’est plus systématique et où les réhabilitations, les rénovations et la modularité deviennent la règle, la maintenance prédictive est indissociable d’une vision patrimoniale de l’immobilier en cohérence avec les enjeux sociétaux.